Les 52 CERCLES : un parking investi par le Street Art à l’abri des regards du public !

Les 52 CERCLES : un parking investi par le Street Art à l’abri des regards du public !

4 février 2022 0 Par Séverine

Graffitis et Street Art dans les parkings sont légions en région Parisienne ! Mais un Parking habillé d’œuvres de Street Artistes et qui n’est pas ouvert au public c’est plutôt rare. À l’origine le projet les 52 cercles, piloté par l’artiste Ojan et la Villa Belleville, ne devait pas prendre une telle ampleur. Mais voilà avec les artistes et leurs réseaux de connexions les choses peuvent évoluer très vite ! J’ai eu l’immense honneur de visiter à huit clos ce lieu plus que surprenant et je vais partager avec vous quelques images et aussi mon ressenti sur cet endroit qui ne m’était pas inconnu !

 

Les 52 cercles - parking Street Art à Paris - Oeuvres de Tcheko, Lek & Sowat

Les 52 Cercles – TCHEKO – LEK & SOWAT – Photo ©Altinnov

 

Quand la découverte d’un Paris Secret me ramène vingt ans en arrière !

C’est certainement la visite Street Art qui a été jusqu’ici la plus étrange pour moi. J’ai contacté la Villa Belleville qui est une formidable résidence d’artistes rue Ramponneau. En arrivant sur place je me rend compte que j’ai travaillé il y a de nombreuses années dans ces mêmes locaux. Le lieu s’appelait le Centre des Comédiens et on y tournait des castings pour le cinéma ! À l’époque l’ambiance du quartier était extrêmement tendue puisqu’un crime crapuleux avait eu lieu dans le Parking situé en face du centre. Les auteurs de celui-ci n’ayant pas été arrêtés on ne s’attardait pas dans le quartier et on avait plutôt tendance à le fuir !

 

Entrée du parking Street Art - Les 52 Cercles - Paysages inconscients par OJAN - Photo @Altinnov

Entrée du parking Street Art – Les 52 Cercles – Paysages inconscients par OJAN – Photo ©Altinnov

 

Je vous avoue que quand nous nous sommes dirigés vers ce même parking, j’étais un peu stressée… Ce que je ne savais pas c’est qu’il avait été vidé, qu’une seule voiture avait été immobilisée dans les lieux comme pièce à conviction et qu’en fait il n’avait jamais ré-ouvert ! Un parking vide dans Paris c’est étrange, et un parking avec une telle histoire ça l’est encore plus !

 

Voiture pièce à conviction repeinte par les street artistes SOWAT & APÔTRE pour les 52 Cercles

Pièce à conviction rebaptisée Death Ride par APÔTRE & SOWAT – Photo ©Altinnov

 

La genèse du projet baptisé les 52 cercles

Le bailleur du parking est la RIVP, bayeur social connu par les Street Artistes pour ses différentes incartades dans leur univers. Il décide de réaliser un projet avant une éventuelle réouverture du parking. Il fait alors appel à la Villa Belleville et à l’artiste Ojan pour réaliser une grande fresque dans celui-ci avec les jeunes du quartier parmi lesquels on retrouve nombre de taggueurs ! Ojan fait signe à ses ami.e.s artistes et invite la jeune Crew RTZ à rejoindre le projet qui dévie vers quelque chose de beaucoup plus grand ! Au final ce sont plus de 30 artistes qui vont se plier à l’exercice de réaliser des œuvres circulaires ; d’où le nom final du projet : Les 52 cercles !

 

Les 52 Cercles : Parking Parisien Street Art avec les oeuvres de : Graffiti Jungle par FLEO - Langage du sous-sol par APÔTRE - Espoir solidaire dans fougères libres par THEO HAGGAÏ - Photo @Altinnov

Graffiti Jungle par FLEO – Langage du sous-sol par APÔTRE – Espoir solidaire dans fougères libres par THEO HAGGAÏ – Photo ©Altinnov

 

Seul un artiste ayant une formation d’architecte aurait pu avoir cette idée. Marier le rond des cercles à l’architecture carrée du parking renforce le caractère du bâtiment tout en lui offrant une nouvelle lecture. J’ai tout de suite pensé que les street artistes avaient dû avoir quelques difficultés à se contraindre à un cercle ! Eux qui ont pour habitude de ne se limiter qu’à de grands murs… ou à se limiter à l’arrivée des forces de l’ordre lorsqu’ils bombent en vandale ! En fait, ils ont su très simplement transformer contrainte en créativité pour un résultat visuellement très doux.

 

Paysage Vu par le Street Artiste et architecte OJAN

Paysage vu par OJAN – Photo ©Altinnov

 

Une déambulation souterraine dictée par l’élément absent du Parking !

Vous êtes-vous retrouvés une seule fois dans un parking nu de voiture ? Personnellement c’était la 1ère fois pour moi ! Pas de bruit, plus d’odeur d’essence ou d’huile, une sorte de zénitude dans un lieu que beaucoup trouvent inquiétant la nuit. Une fois accueillie par les cercles d’Ojan, la descente dans le Parking commence ; et je distingue sur ma droite l’écriture automatique d’Apôtre. Je me rends compte que je suis en train de circuler comme une voiture qui éviterait celles garées… Je continue donc ma visite en être humain conditionné que je suis, avec cette étrange sensation de découvrir des œuvres par le bout d’une lorgnette !

 

Street Art dans un parking Parisien abandonné - Oeuvre de l'artiste Apôtre

Langage du sous-sol par APÔTRE – Photo ©Altinnov

 

Sagesse et sérénité se dégagent d’un bon nombre d’œuvres !

J’ai attendu quelque temps avant de pouvoir mettre des mots sur mon ou mes ressentis lors de ma visite. La thématique de la nature choisie par Ojan, les codes couleurs qu’il a essayé de faire passer aux artistes font que l’ensemble est très apaisant. Un sentiment curieux surtout lorsque l’on connaît le lieu et son histoire !

Beaucoup d’œuvres sont très graphiques, géométriques voire rigoristes et s’harmonisent élégamment avec l’architecture. Il y a comme une discussion qui s’engage entre cette structure massive, carrée et la légèreté de ces bulles créatives. En laissant aller quelque peu son imagination on a l’étrange sensation de voir les œuvres se poursuivent au-delà des cercles… Ces œuvres répondent totalement à d’autres plus organiques et c’est une douce alchimie qui fonctionne très bien. Peut-être aussi parce qu’elles sont suffisamment espacées les unes des autres afin de pouvoir respirer sans s’entrechoquer.

 

Expo Les 52 Cercles - Oeuvres Underground Moon par Arnaud Liard

Underground Moon par Arnaud Liard – Photo ©Altinnov

 

Quand l’artiste joue avec la notion de cercle jusqu’à le faire disparaître

Anamorphismes, illusions d’optique,… Certains artistes ont brisé les règles et cela tombe bien puisqu’ils brisent aussi une monotonie qui aurait pu s’installer. Je ne vais pas vous cacher que j’adore ceux qui cassent les codes pour mieux les réinventer ! Rompre le cercle, l’étaler sur plusieurs poteaux et laisser à l’œil la possibilité ou pas de le reconstituer, c’est ce qu’a fait Ojan avec un graphisme épuré à souhait. Hydrane a choisi d’étirer celui-ci comme une boule de chewing-gum qui s’étendrait à perte de vue. Lek a eu l’ingéniosité de faire disparaître et renaitre le cercle en travaillant autour de celui-ci. Kid Kreol & Boogie ont imaginé la suite de ce que pourrait être l’œuvre qui justement sortirait du cercle. Quant à Panzer, il a réussi à glisser tous les codes du graffiti « old school » dans une œuvre haute en couleurs. Après ces quelques photos vous aurez saisi qu’il y a eu dans ce parking une belle émulation créative !

Les 52 Cercles - Street Art Parking Oeuvre anamorphique de l'artiste OJAN

Paysage rouge par OJAN – Photo ©Altinnov

 

52 CERCLES_HYDRANE_06©WLV

Les 52 Cercles – Lago par Hydrane – Photo ©WLV

 

Parking Street Art dans Paris - oeuvre de LEK -

Cosmos 2021 par LEK – Photo ©Altinnov

 

Street Art Parking Paris - Oeuvre de KID KREOL & BOOGIE ©Altinnov

Les 52 Cercles KID KREOL & BOOGIE – Photo ©Altinnov

 

Les 52 Cercles - Triceraroboticofuturiste par PANZER - Photo ©Altinnov

Triceraroboticofuturiste par PANZER – Photo ©Altinnov

 

Une explosion de couleurs par la Crew RTZ

Ils ont pour habitude de poser leur blaze sur les hauteurs de Belleville. Parfois dans les endroits les plus inaccessibles. Imaginer que ces jeunes taggueurs aient eu la patience de se concentrer sur un cercle, prendre le temps de créer est assez étonnant ! Il y a du bon dans la surprise ! Leurs œuvres sont foisonnantes de couleurs, on sent un certain vent de liberté dans celles-ci. Leurs univers très colorés contrastent avec les œuvres plus sages des artistes expérimentés. Les cercles se répondent et se complètent et j’avoue que cette surdose de couleurs au fin fond du parking est la bienvenue ! J’ai sélectionné deux œuvres : La première de VEED qui nous offre un Blaze percutant avec une écriture que l’on n’a pas l’habitude de voir. La seconde de Souleymane qui a réalisé une composition structurée dans un espace réduit. Il réussit l’exercice difficile de nous raconter une histoire en une image. Sincèrement il y a dans cette crew de la graine de talent 😉

Les 52 Cercles, exposition Street Art dans un parking à Belleville - Artiste VEED

Plisse les yeux  par VEED – Photo ©Altinnov

 

Les 52 cercles - graffiti à Paris - oeuvre Vizion verdure de Souleyman

Vizion Verdure par Souleymane – Photo ©Altinnov

 

Accompagnée d’un Golgoth ma visite touche à sa fin

J’avais déjà eu un coup de cœur pour le swing des personnages de Tcheko du côté du Canal de l’Ourcq ! Rien de surprenant donc à ce que je choisisse le buste de son Golgoth comme couverture de l’article. Tcheko a disloqué son puissant personnage au fond du parking. Il est comme une présence rassurante qui vous invite à suivre la visite en toute quiétude. Je suis bluffée par la façon dont il maitrise l’anatomie et aussi par la façon dont il a utilisé les lieux pour mettre en lumière son géant tout en magnifiant l’espace. Le pied de ce Golgoth nous fait ressentir la prise d’élan d’un coureur sur piste. On retrouve ce même élan dans ses jambes.. Puis une main crispée nous invite à nous arrêter tandis que l’autre d’une grande élégance pointe vers l’œuvre de LEGZ… Il y a du génie dans cette réalisation qui vient, elle aussi, casser le rythme des cercles pour nous imposer le sien. Sans lui la visite ne serait pas la même. Je vous invite donc à suivre David ‘Tcheko’ Latulipe, car à mon avis il nous réserve encore de belles surprises.

Bras de GolGothOne par David Tcheko Latulipe aux 52 cercles à Belleville-Photo ©Altinnov

Cloud Climber par LEGZ & GolgothOne par Tcheko – ©Altinnov

 

main crispée de GolGothOne par David Tcheko Latulipe aux 52 cercles à Belleville-Photo ©Altinnov

KMER de la Crew RTZ & GolgothOne par Tcheko – Photo ©Altinnov

 

Jambes de GolGothOne par David Tcheko Latulipe aux 52 cercles à Belleville-Photo ©Altinnov

STUZ de la Crew RTZ & GolgothOne par Tcheko – Photo ©Altinnov

 

Pied de GolGothOne par David Tcheko Latulipe aux 52 cercles à Belleville-Photo ©Altinnov

GolGothOne par David Tcheko Latulipe – Photo ©Altinnov

 

Comment vous faire profiter de ces 52 cercles hors du commun ?

A cette question seul le bayeur pourrait répondre ! Je vous le dis comme je le pense c’est un crève-cœur que de savoir ce lieu magique fermé au public, encore plus quand on voit le succès qu’avait eu L’Essentiel Paris l’été dernier. Ojan, avec l’aide de la Villa Belleville à la production, a réussi un travail d’équilibriste qui rend la visite d’une fluidité déconcertante. Si le lieu était ouvert je vous dirais d’y courir sans attendre. Peut-être que si vous faites du bruit, le bailleur vous entendra en retour ? Peut-être que si les journalistes qui l’on visité en parlait sans attendre une éventuelle ouverture cela permettrait de trouver un gentil mécène pour offrir ce lieu au public ? J’espère de tout cœur que lorsque la RIVP lira ces lignes, elle aura envie comme moi de vous faire partager cette belle aventure ! Avant de vous quitter et de repartir vers de nouvelles découvertes, je voulais remercier chaleureusement Ojan, la Villa Belleville et tous les artistes qui m’ont permis de partager cette œuvre collective créative que sont les 52 cercles.

A très bientôt pour de nouvelles aventures Street Art !

Séverine