Sous le street art, le Louvre : un livre ingénieux offrant un bel éclairage sur l’Art Urbain
26 novembre 2020Cet ouvrage « Sous le street art, le Louvre » est un de mes livres de chevet depuis quelques semaines déjà. Si vous suivez mes promenades street art, vous savez que je vous offre souvent à voir des œuvres qui flirtent avec la peinture classique, comme celle d’Andréa Ravo-Mattoni ou celles de Pboy et du Jeune Jarus plus proches des courants modernes voire figuratifs. J’ai toujours pensé que l’art urbain était une passerelle essentielle, car accessible à tous, vers une autre forme d’art plus conventionnelle. Voir un enfant s’extasier devant une œuvre de Pboy et ses parents lui répondre en parlant de l’œuvre originelle et du contexte de l’époque est pour moi une des plus belle façon de faire découvrir aux jeunes générations les trésors cachés dans les musées. Le confinement m’ayant empêchée de vous faire découvrir de nouvelles promenades, j’ai passé pas mal de temps à feuilleter mes livres sur le street art et me suis enfin décidée à créer une rubrique Livres sur le blog. Mais je ne suis ni critique littéraire, ni critique d’art ; donc c’est avec mon ressenti que je partagerai avec vous mon point de vue très subjectif sur chaque ouvrage, et pour illustrer chaque critique, j’utiliserai mes propres photos plutôt que celles de l’ouvrage en question. Un nouvel exercice qui ne pouvait que commencer avec « Sous le street art, le Louvre » de Cyrille Gouyette qui est un livre dont je ne ma lasse pas et que j’ai prévu d’offrir en nombre pour les fêtes de fin d’année !
Cyrille Gouyette, homme de Culture, insuffle un vent de fraîcheur aux œuvres du Louvre
Si je qualifiais cet auteur d’électron libre de la culture, peut-être que cette appellation ne lui conviendrait pas. Mais elle représente assez bien l’image qui ressort de ce personnage à même de faire redécouvrir avec passion les œuvres les plus classiques par le biais du street art. Selon la petite histoire, il aurait eu un choc, une révélation lors de sa visite de l’école-musée Art42 en 2015… Comme s’il n’avait pas auparavant aperçu les murs de Paris se parer d’œuvres en tous genres… Sincèrement vues les passionnantes petites histoires dont je me suis délectée sur sa chaîne YouTube, j’ai du mal à imaginer cet érudit charismatique emprunter depuis 1993, date de son entrée au Louvre, un passage secret pour le ramener directement chez lui sans passer par la case métro, graffitis et fresques murales qu’offrent la ville de Paris.
Cet électrochoc « street artien » est peut-être dû au fait de voir ces œuvres réunies en un seul lieu, la multiplicité des œuvres et sa variété a peut-être eu plus d’effet que les œuvres isolées en extérieur. Passé cette croustillante anecdote, je ne vais pas m‘étendre sur le parcours de l’auteur au sein du sacrosaint Louvre ni sur son engagement culturel sans faille et sans limite. Je vais tout simplement vous offrir à voir une de ses savoureuses vidéos dans laquelle il jongle avec la langue française avec délectation tout en offrant en une minute chrono un éclairage judicieux sur une œuvre d’art urbain.
Associer les grands classiques de la peinture à l’art urbain : un périlleux exercice !
Vous ne voyez très certainement pas le côté périlleux de l’exercice qu’a réalisé Cyrille Gouyette, car si vous me suivez c’est que vous aimez découvrir de nouvelles œuvres de street art. C’est aussi que vous savez pertinemment qu’un grand nombre d’artistes a eu une formation classique et savent utiliser, comme les maîtres d’un autre siècle, différentes techniques afin de réaliser leurs œuvres. Ce que vous imaginez peut-être moins, ce sont les messages incendiaires que je reçois depuis que j’ai commencé le blog ; des messages très agressifs envers l’art urbain qui selon leurs détracteurs n’a pas commune mesure avec la « vraie peinture ». « Sous le street art, le Louvre » est donc beaucoup plus audacieux qu’il n’y paraît à première vue ! Cet ouvrage est-il capable d’apaiser les détracteurs ou passionnés de peinture classique ? N’est-il pas trop fantaisiste par son grand écart stylistique en passant du Louvre à la rue ? Je vais essayer de répondre à ma façon à ces questions en passant à l’étape « critique » de l’ouvrage lui-même.
« Sous le street art, Le Louvre » : une autre lecture de l’art de rue
Dire que le sujet a été traité avec une grande délicatesse serait un euphémisme ! L’auteur a eu l’intelligence de ne pas pondre un roman pédagogique chronologique ; mais un ouvrage qui se déguste selon l’envie, nulle obligation de commencer par le commencement même s’il fait référence à l’artiste Lasco qui reproduit les peintures d’un lieu désormais inaccessible au public. Ouvrir une page au hasard est le meilleur moyen de déguster ce livre !
Cet ouvrage apporte un éclairage sur les sources d’inspirations de nombreux artistes urbains ; on y apprend que Speedy Graphito s’est construit avec le Louvre, que Blek le Rat voulait en faire sortir les œuvres et que ce lieu mythique est une source d’inspiration intarissable pour Madame.
On y découvre que la Joconde admirée par quelques millions de visiteurs chaque année est une source incroyable d’inspiration pour les Street Artistes ; ce qui ne nous étonne qu’à moitié. Mais aussi que d’autre chef d’œuvres comme « La Liberté guidant le Peuple » d’ Eugène Delacroix ou encore « Bonaparte franchissant le grand Saint Bernard » de Jacques-Louis David ont donné lieu à un nombre étonnant d’interprétations !
Bien entendu, cet ouvrage ne s’arrête pas à la beauté de l’œuvre muséale et à sa transposition dans notre univers citadin. Même si un artiste comme Andréa Ravo-Mattoni travaille sur un devoir de mémoire et de transmission, d’autres sont plus investis et traduisent en langage moderne engagements, revendications politiques, affirmations identitaires,… Cyrille Gouyette a su conjuguer le beau, la forme avec l’intention et le fond au fil de ses chapitres.
Là où l’auteur a fait preuve d’une grande délicatesse est la façon dont est construit l’ouvrage afin de ne heurter aucune sensibilité tout en continuant son travail de recherche avec dextérité. Il différencie avec une élégante subtilité la reproduction & l’interprétation d’une œuvre, l’inspiration qu’elle a pu susciter, et le détournement qu’elle a pu subir.
Et arrive cet instant où une œuvre de street art ne ressemble en rien à une peinture du Louvre mais vous fait penser à celle-ci par une gestuelle particulière, l’intensité d’un regard, la forme d’un visage, la poésie ou tendresse qui émane de l’œuvre. Cette partie de l’ouvrage fait appelle à l’interprétation de celui qui regarde l’œuvre, et également à ses sentiments ; elle a été réalisée avec grande sensibilité et j’en suis certaine vous fera regarder n’importe quelle œuvre de street art avec une nouvelle forme d’attention.
Vous dire que cet ouvrage fera changer le regard des détracteurs de l’art urbain serait présomptueux. Mais je suis certaine qu’ils le liraient avec autant de curiosité et d’enthousiasme que moi. La façon dont les œuvres se répondent est magique ; un texte riche et un vocabulaire relevé apportent un supplément d’âme aux œuvres soigneusement sélectionnées. Mais n’ayez pas peur, le texte n’est pas trop présent, il porte les nombreuses œuvres et accompagne votre regard. Ce livre se lit autant qu’il se regarde.
Faut-il vous plonger dans la lecture de « Sous le street art, Le Louvre » ?
C’est avec un OUI magistral que je vous répondrai ! Si vous aimez le street art, vous vous passionnerez pour les références au classique qui vous ont peut-être échappées par le passé. Si vous vous questionnez sur la légitimité de l’Art Urbain, vous aurez une réponse éclairée à celle-ci. Il pourrait même vous donner envie de retourner voir de l’art classique au Louvre après sa lecture ! Et si vous avez un grand amateur de classique dans votre entourage ; ce livre saura saisir sa curiosité et peut-être lui apportera un autre éclairage sur ce qu’est réellement l’art urbain.
Avec ce livre Cyrille Gouyette fait rentrer par une belle porte le street art dans l’Histoire de l’Art. Un grand merci à lui pour cette belle prouesse.
« Sous le street art, le Louvre » est édité aux Editions Alternatives et est disponible dans toutes les bonnes librairies ou à la Fnac pour la modique somme de 25 euros ou en commande sur Amazon pour les plus pressés.
Les photos illustrant cette première présentation de livre sont issues de mes promenades street art à Boulogne-sur-mer et Canal de l’Ourcq à Paris pour Andréa Ravo-Mattoni, au Mur Ordener pour Pboy, dans le quartier des Frigos de Paris pour Tristan Eaton, et celui de l’incroyable musée du street art – Boulevard Paris 13 – pour Conor Harrington.
A très bientôt pour une nouvelle aventure street art dans le Lower East Side de Manhattan !
Streetartement votre
Séverine