Histoire du Houston Bowery Wall à Manhattan ! Le mur iconique du monde du Street Art !
15 février 2019Je vais dans cet article vous retracer toute l’histoire de ce fameux mur qui a connu bien des rebondissements !
Naissance d’une légende : Keith Haring investi le Bowery Wall !
Avant 1982 ; ce mur s’ornait déjà de graffitis en tous genres ; mais la légende a réellement commencé cette année là quand Keith Haring s’est approprié l’intégralité du mur en réalisant une fresque géante. Il fut le 1er à peindre un mur géant à New York. Une fresque qui est restée sans aucune dégradation pendant plusieurs années !
En 1984 la société immobilière Goldman Properties acquière ce drôle de bout de mur et laissa la peinture murale d’Haring intacte pendant quelques mois. Bien évidemment quelques mois plus tard ; la fresque a disparu du mur et pendant deux décennies ce sont des publicités qui ornaient ce mur. Des publicités qui ne manquaient pas d’être systématiquement taguées !
En 2008, Tony Goldman, membre honoraire de Goldman Properties, et grand amateur d’art s’associe avec son ami Jeffrey Deitch – conservateur, collectionneur et marchand – afin de faire revivre ce mur emblématique et de le rendre aux artistes. Ils lancent un programme en sélectionnant des artistes du monde entier qui vont se succéder et faire de ce mur le plus connu au monde.
Pour démarrer ce projet en beauté, ils font équipe avec la Fondation Keith Haring et commissionnent l’entreprise Gotham Scenic afin de recréer le mur original de Keith Haring. Mur qui sera inauguré pour le 50ème anniversaire de l’artiste en 2008.
Plus de 30 Street Artistes ont posé leur signature sur le Bowery Mural
Les plus grands artistes de Street Art ont été invités à réaliser une œuvre pour ce mur et l’histoire continue. Je me suis donc mise à la recherche de toutes les fresques réalisées depuis que Goldman Properties s’était mis à « sponsoriser » ce lieu; et cela n’a pas été une mince affaire. Je pensais tout trouver sur les réseaux sociaux ; mais les recherches ont été plus compliquées que prévues. Voici l’intégralité de l’histoire du mur que j’ai réussi à recréer en y passant pas mal de temps. Pour certaines périodes, j’ai même trouvé des anecdotes grâce à des interviews des années 90 conservées dans de vieilles archives de la presse New Yorkaise. Finalement je me suis transformée en documentaliste et j’espère sincèrement que l’histoire plus qu’étonnante de ce mur vous passionnera tout autant que moi !
Après Keith Haring c’est le Brésil qui ouvre le bal avec le duo Os Gêmeos !
En 2009 C’est Os Gêmeos, deux frères jumeaux Brésilien de Sao Paolo, qui ont la lourde tâche de succéder à Keith Haring ; le défi est relevé et l’œuvre est acclamée. L’histoire du mur commence à se redessiner. Comme beaucoup de vrais jumeaux Otavio et Gustavo Pandolfo ont un langage qui leur est propre, coloré, emprunt de leur vie quotidienne au Brésil et des problèmes sociaux politiques du pays. On reconnaît très facilement leur travail grâce aux visages jaunes, ronds, très expressifs représentant le métissage Brésilien.
En 2010 c’est Shepard Fairey qui prend la relève et le chaos s’installe !
Shepard Fairey aussi connu sous le nom de sa marque Obey prend relais. Il réalise une fresque un peu particulière qui est, en fait, une œuvre promotionnelle pour annoncer son exposition à venir « Shepard’s May Day » et qui bien sûr est financée par Jeffrey Deitch en personne !
Et ce qui devait arriver arriva les graffeurs New Yorkais ont sanctionné l’œuvre et dès la 1ère semaine toute la partie basse était recouverte par des graffitis.
Ensuite la situation s’est aggravée et des pans du mur ont été arrachés laissant apparaitre l’œuvre précédente d’ OS GEMEOS ! L’histoire ne dit pas si l’œuvre précédente avait été conservée pour des raisons financières ou pas ! Mais devant autant de dégradations des panneaux en bois ont été posés sur le bas de l’œuvre de Shepard Fairey pour limiter les dégâts. Bien sûr ces panneaux ont été immédiatement tagués !
Au cas où le nom de Shepard Fairey n’évoque rien pour vous; c’est lui qui avait réalisé l’affiche « HOPE » rendue célèbre lors de la campagne de Barack Obama… rien que ça !
Retour aux racines : Le Bowery Wall se pare de Graffitis !
En Août 2010 c’est l’année du changement ; Jeffrey Deitch est nommé Directeur du Musée d’Art Contemporain de Los Angeles. Tony Goldman reprend donc les commandes et c’est la galerie The Hole qui reprend la main côté « programmation ». La galerie choisit de réunir deux artistes Barry McGee, alias TWIST, et Josh Lazcano, alias AMAZE, qui vont réaliser leur première collaboration. Ils décident de rendre hommage aux graffeurs légendaires avec un mur rempli de centaines de Tags rouges ! Ces deux comparses travaillent aujourd’hui toujours ensemble ; mais se sont un peu éloignés du Street Art.
Avant de passer à un autre artiste, la galerie donne carte blanche à l’IRAK Grafitti Crew, une des plus célèbres équipes de graffeurs New Yorkais qui n’a rien à voir avec l’Irak bien sûr. Chaque équipe de graffeurs a son nom à New York et chaque graffeur son propre Tag –sa signature-. Le mur est alors poli puis l’équipe pulvérise un SACE géant en hommage à Dash Snow le co-fondateur de l’équipe décédé en 2019 à l’âge de 27 dont le Tag était SACE.
Kenny Scharf, ancien ami de Keith Haring clôture la saison 2010 en couleurs !
Avec ses amis jean-Michel Basquiat et Keith Haring ; Kenny Scharf faisait partie de ces artistes qui ont façonné l’East Village ; comme ses comparses il s’essayait à tout : la sculpture, la peinture, la mode, les performances, les vidéos… Avec le temps est resté un univers très coloré pop art, joueur, optimiste et joyeux. Son mur restera quasi intact jusqu’en juin 2011. Il vit toujours à New York et expose très souvent ; il n’a pas tourné le dos au street art puisque je suis tombé sur une de ses fresques, toute fraîche, dans East Village !
Avec JR, la France à l’honneur sur le Bowery Wall !
Je sais que cela va vous paraître étonnant, car JR est le seul et unique artiste à avoir posé une œuvre par deux fois sur ce mur géant. Et la presse n’a pas fait grand écho de cette 1ère œuvre ! Il est vrai que pendant sa période d’exposition de fin juin 2011 à fin Octobre 2011, les Etats-Unis ont connu l’un des plus sombre épisode de son histoire. Mais je vais quand même vous raconter la petite histoire de cette œuvre qui est le début d’un long travail entreprit par notre Frenchie.
En Novembre 2010 JR se voit récompensé du très prestigieux prix de la Fondation TED (Technology, Entertainment, Design). L’institution délivre alors un chèque de 100 000 $ à l’ « individu exceptionnel » qui remporte le prix. Individu qui est invité solennellement à émettre un vœu que la fondation TED se chargera de réaliser. En Mars 2011 Il lance le projet INSIDE OUT en s’exprimant ainsi devant l’assemblée de la Fondation TED : « Je fais le vœu que vous vous mobilisiez pour les causes qui vous importent en participant à un projet artistique mondial, et tous ensemble nous allons transformer le monde… »
La 1ère pierre à cet édifice sera la photo du Bowery Wall qui replace l’indien au cœur de son territoire, de sa terre volée. Un hommage aux vrais natifs de cette ville qui dont les descendants sont désormais dans les réserves de Standing Rock et Pineridge. Une image comme vous pouvez l’imaginer qui a plutôt choqué les New-Yorkais.
Le duo FAILE ramène de la couleur dans le cœur des New-Yorkais
Changement radical de style ! Fin octobre 2011, le duo de Brooklyn FAILE ramène de la joie et de la bonne humeur au cœur de Manhattan. C’est très tranchant par rapport à l’œuvre de JR et la ville en avait bien besoin. On retrouve tout ce qui fait la culture POP, des références aux Comics Américains, des couleurs pêchues, des typographies soignées. Un univers acidulé tout en collage comme les Américains les aiment ! FAILE a été fondé par Patrick McNeil et Patrick Miller, aujourd’hui c’est devenu un collectif et il n’est pas rare de voir leurs nouvelles œuvres du côté du Bushwick Collective à Brooklyn.
Le Street Art de Los Angeles débarque sur le mur avec RETNA !
Il aura fallu deux journées entières à RETNA, les 3 et 4 Mars 2012, pour imposer sa calligraphie si spéciale et reconnaissable entre toutes sur le Bowery Wall. Inspiré par les symboles hébreux, arabes et les hiéroglyphes anciens, ces inscriptions en rouge et bleu reflètent la sensibilité de cet artiste graffeur ; il signe le Mur avec l’appellation « Ex Vandale Wild Style ». Aujourd’hui cet artiste collabore avec de nombreuses marques comme Louis Vuitton ou encore Supra ; mais continue à exposer dans la rue . Il vient d’ailleurs de finir un mur à Paris à Saint-Philippe du Roule.
Enfin ! Une artiste femme expose sur le mur : Aiko Nakagawa entre en scène !
Il aura fallu attendre quatre années avant de voir enfin le travail d’une femme sur cet iconique Bowery Wall en Juillet 2012. Aiko Nakagawa est Japonaise ; elle fait partie des membres fondateurs du collectif FAILE. Son côté manga pop sexy est parfois ultra-provocateur ; elle ramène donc une touche de féminité qui manquait à ce mur… Sa signature Aiko ou Lady Aiko signifie « Petit Amour » en Japonais. Un style qui tranche avec l’éducation ultra-conservatrice Japonaise qu’elle a reçue. C’est aujourd’hui une artiste incontournable dans le monde du Street Art et des graffitis.
L’histoire du Bowery Wall aurait pu s’arrêter là ; car Tony Goldman décède en septembre 2012 ; mais sa fille Jessica Goldman Srebnick épaulait déjà son père dans ses démarches artistiques à New York et à Miami. Elle reprend le flambeau de l’entreprise familiale et continue l’histoire du mur. En octobre 2012 une nouvelle fresque envahit le mur !
Une nouvelle paire de jumeaux How and Nosm s’attaquent au mur !
Quelques jours seulement après le fameux ouragan Sandy et dès que l’eau qui avait envahit Manhattan n’était plus présente, ces deux jumeaux originaires d’Espagne se sont attaqués au mur. Ils ont créé une fresque extrêmement détaillée où l’on peut voir un grand nombre d’ampoules avec de la fumée noire qui s’échappe de la ville engloutie. Des poissons côtoient des prises électriques,… un œuvre qui vraisemblablement a été directement inspirée de l’ouragan qui venait à peine de quitter la ville. Ils ont d’ailleurs baptisé cette fresque du nom « The day after ».
Hommage à Martha Cooper : LA photographe du monde du Street Art !
Elle est une figure incontournable du Street Art New Yorkais ; par le prisme de son objectif Martha Cooper a immortalisé l’intégralité des graffeurs et Street Artistes New-yorkais au fil des années. Elle était d’ailleurs présente auprès de Keith Haring en 1982, elle est la mémoire des années les plus prolifiques en terme de création artistique ! Avec le temps elle est devenu la photographe officielle du Bowery Wall. Alors rien d’étonnant que pour cet hommage en mars 2013, les plus grands artistes se précipitent pour lui rendre un hommage très personnel à l’occasion de son anniversaire. On retrouve sur cette fresque le travail des artistes : Aiko, Bio, Crash, Daze, Faust, Freedom, LadyPink, Terror et How & Nosm. Les artistes sur ce mur lui offre un remerciement spécial sous forme de dédicace « From The Streets of the World To the 2’s & 5’s Thanks To Our Work SURVIVES ! »
Une légende du Bronx, Crash, succède à ce vibrant hommage !
John Matos, alias Crash, fait partie de ces légendes qui ont tagué les métros et les murs des tunnels de New York dans les années 80. Un vrai graffeur du Bronx très influencé par les Comics Américains. Personne ne sera donc surpris quand Crash se met a dessiner sur ce mur mythique un Popeye géant en mars 2013 ! L’artiste dans la partie gauche fait référence aux Tags des métros et à droite fini son œuvre avec le style « pochoir » qui est dans la tendance des graffitis de l’époque.
REVOK et POSE transforment littéralement le Bowery Wall
Ils sont beaucoup moins connus que les artistes précédents et s’attaquent au mur en continu pendant 7 jours et 7 nuits en pleine canicule de juillet 2013. Pour ces deux artistes de Los Angeles la pression que représente ce mur est énorme ! REVOK déclare au HuffPost « J’ai le sentiment qu’il est de ma responsabilité de rendre hommage aux gens et à la culture qui m’a créé, rendre hommage aux graffitis de New York et au mouvement en général ». Devant la tâche à accomplir les deux artistes se font accompagner par plus de 30 graffeurs New-Yorkais tout au long de ce travail qui leur paraît titanesque ! Au final cette fresque visuellement cacophonique devient une référence dans le monde des graffeurs. Et l’une des plus appréciée des New-Yorkais depuis très longtemps.
La talentueuse SWOON illumine le Bowery Wall
Je ne vais pas vous le cacher, SWOON est pour moi la Street Artiste la plus intéressante de notre époque. Elle a une technique très particulière puisque tous ses collages ont été gravés antérieurement. La sensibilité qui se dégage de ses œuvres est en adéquation avec son investissement personnel dans des missions humanitaires. Elle sait que le passage de l’ouragan Sandy est encore un traumatisme pour les New-Yorkais ; elle décide donc de se faire accompagner dans son travail par Groundswell, un collectif d’artiste qui a dévoilé une série de fresques murales traitant de la guérison dans les quartiers de New York les plus touchés par la tempête. Il en résulte une sirène majestueuse… Une renaissance pour certains. Il n’en reste pas moins que dès le début de l’année 2014 l’Œuvre est une fois de plus la proie des teams de graffeurs New-Yorkais.
Le mur devient un maillage symétrique de couleurs avec l’artiste Maya Hayuk
Cette artiste Américaine a une obsession pour la symétrie et les motifs complexes associés à des couleurs luxuriantes. Ses fresques, souvent géantes, rappellent selon elle une vue de l’espace ou une vue au travers d’un kaléidoscope qui pointerait vers de l’artisanat traditionnel ukrainien, des mandalas, ou des tissages Mexicains. Aux Etats-Unis, Maya Hayuk s’est faite connaître en étant la 1ère artiste de rue à attaquer en justice Starbucks qui avait utilisé ses dessins sans autorisation. Bien sûr elle n’a pas eu gain de cause ; les œuvres de rue ne bénéficiant pas des mêmes droits que les autres. Mis à part 3 graffitis sur la partie basse ; son œuvre sur le Bowery Wall restera quasiment intacte de mars à mai 2014.
COPE2 le légendaire graffeur New-Yorkais replace le graffiti au cœur de Manhattan !
COPE2 incarne à lui seul l’histoire du graffiti New-Yorkais! C’est le graffeur qui de son Tag a le plus vandalisé le métro de New York dès les années 70… Et il continue de sévir à Brooklyn, dans le Bronx… Des Tags apparaissent tous les jours ! Dire que pour lui, la réalisation de ce mur est une consécration serait un euphémisme ! Pour cette réalisation il ne s’est pas éloigner de son esthétique « sauvage » et a mixé lettrage bulles avec d’autres éléments de graffiti plus traditionnels. Il n’a pas pu s’empêcher d’inviter sa partenaire de crime de longue date, INDIE 184, a venir ajouter son Tag sur le mure. Un résultat haut en couleur pour cet été 2014 ; un bel hommage au graffiti New-Yorkais.
Retour vers le passé ! Le mur d’Os Gêmeos réapparait par miracle en octobre 2014
On ne sait pas la raison réelle de ce revirement de situation. Le caisson qui avait été posé au dessus de la fresque d’Os Gêmeos a été intégralement retiré. La peinture d’Os Gémeos réapparaît comme par enchantement et l’on voit que les 5 années qui se sont écoulées ne l’ont que très peu dégradé. En cherchant bien j’ai trouvé une vidéo de cet événement :
Ensuite s’en suit une période très peu médiatisée et d’ailleurs dans le peu d’article que j’ai pu trouver sur le Web ; tous les visuels ont été retirés. Il semblerait que le mur ait été un peu englouti derrière les panneaux servant à protéger ces travaux ou même détruit. Je me suis permise d’envoyer un mail à Goldman Properties pour savoir ce qui s’était vraiment passé. Le mur a-t-il été abattu puis reconstruit ensuite ? Pas de réponse pour le moment. Mais force est de constater qu’en Avril 2015 le mur reprend du service et il est très propre ; d’ailleurs son coin gauche endommagé auparavant ne l’est plus ! Etonnant non !
Ron English vient percuter New York avec son bébé Hulk : géant !
Cette image a envahit les réseaux sociaux ! C’est certainement la fresque la plus médiatisée depuis l’existence du mur ! Et puis que dire de Ron English ? Il est une légende vivante ! C’est lui qui a initié aux Etats-Unis le Kidnapping des panneaux publicitaires pour y faire du Street Art ! C’est aussi l’artiste qui a le plus eu affaire aux tribunaux et aux juges pour défendre la propriété intellectuelle des arts urbains. Il a créé de nombreux personnages satiriques et emblématiques tout au long de sa carrière. Avec ce bébé Hulk géant enragé ; il offre à la ville de New York une œuvre époustouflante.
L’intégralité du drapeau Américain étant composé de fausses publicités critiquant la surconsommation Américaine et ses dérives. On peut y lire « Diabetic Coke » avec la typographie de Coca-Cola, Cereal Killer avec la typo de Kellog’s, Bad Buddha Burger – more pounds less cents avec l’image d’un monsieur Macdonald obèse,…
Une œuvre choc qui ne plait guère aux multinationales de la malbouffe. Mais une œuvre adulée par les New-Yorkais… Et je ne vais pas le cacher je suis une grande Fan de son travail aussi 😉
Le graffeur Futura 2000 passe après Ron English avec sa « Concrete Jungle »
Passer derrière une légende dont l’œuvre est restée plus longtemps que prévu n’est pas une mince affaire. En Octobre 2015, c’est à Futura 2000, un artiste de Brooklyn, graffeur réputé, de prendre la relève. C’est le 1er des graffeurs a avoir mixé graffiti et art abstrait. Il a déjà une solide réputation dans le milieu de l’art contemporain lorsqu’il s’attaque au mur. Il décide d’offrir une nouvelle vision du mur et de la jungle urbaine; car n’importe quelle œuvre colorée passerait inaperçue. Il réalise une œuvre abstraite presque monochrome baptisée « Concrete Jungle » aux New-Yorkais. Une œuvre qui tranche complètement avec la précédente, et qui montre bien la diversité et la richesse des talents du monde du Street Art.
Logan Hicks, le roi du pochoir, étale sa vie, ses amis sur le mur !
Logan Hicks est considéré comme un très grand pochoiriste et sérigraphe aux Etats-Unis ; il est né en Floride mais a très vite adopté New-York. Ses pochoirs représentant des scènes de rues souvent banales sont d’u n tel détail que l’on croirait voir de la photographie hyperréaliste. Un travail d’une précision indécente qu’il réalise à la main ou au laser. Pour le coup je ne vous conseille même pas son Instagram, qui ne lui rend pas hommage ; mais plutôt son site qui est impressionnant ! En Août 2016 il s’attaque donc au mur ; un travail rendu long et difficile de part sa technique ; il construit sa fresque couche par couche avec des panneaux de carton qu’il graffe avec ses pochoirs et assemblent ensuite un par un. Un travail de fourmi pour cette fresque monumentale. Un paysage urbain, qui selon lui, représente son passé, son présent et son futur à New York. Petite précision importante ; tous les personnages sur cette fresque sont des amis de l’artiste.
Le mur se pare de Mythologie Urbaine grâce au duo Pichi & Avo
Ce duo d’artistes venu de Valence en Espagne a du braver des températures glaciales en février 2017 pour arriver au bout de leur fresque. Leur style bien particulier marie la sculpture classique à l’art urbain. Pour cette fresque monumentale ils ont marié dieux antiques et graffitis pour créer une « Hymne homérique Urbain à Poséidon » ! Chacune de leurs œuvres est réalisée sur le mode de la performance ; ils commencent par le côté néoclassique et recouvre petit à petit l’œuvre de graffitis pour qu’au final, seuls les graffitis subsistent !
Cette fresque vient célébrer leurs dix années de collaboration et bien sûr ces deux comparses continuent à travailler ensemble et on trouvé un nom à leur style « urbanmythology »
David Choe ou la plus grande controverse du légendaire mur de Bowery !
Juin 2017 : le mur de la honte…
Difficile de savoir ce que David Choe a voulu exprimer dans son travail tellement le mur a été controversé dès le 1er jour ! La 1ère semaine l’équipe de graffeurs Big Time Mafia vient sanctionner la fresque à peine fraîche ! Personne ne sait si cela a un lien avec l’artiste qui est soupçonné d’avoir été agresseur sexuel… ou si tout simplement l’équipe de graffeurs sanctionne l’œuvre elle-même en estimant qu’elle n’est pas digne du mur ! Quelques jours plus tard, l’inscription « rapist » est apposée sur le mur.
Puis un autre Tag rouge sang réalisé par Blake membre du groupe BTM vient cacher une partie de la fresque.10 jours après la réalisation de sa fresque David Choe s’exprime enfin sur Instagram le 17 juin 2017 en reconnaissant qu’il a eu des paroles déplacées et qu’il s’est vanté oralement de comportements déviants qu’il n’aurait pas eu pour se donner de l’aplomb. Il déclare dans son message qu’il a longuement travaillé à changer ses comportements et demande pardon aux personnes qu’il aurait pu heurter par ses paroles. Le mal est fait, le 18 juin le mur de David Choe est blanchi à la chaux, sans que l’on sache si Goldman Properties a fait le nécessaire ou si l’artiste lui-même a voulu se blanchir. L’histoire du Bowery Wall est désormais entachée… Le lieu devient un haut lieu de manifestation contre les violences sexuelles !
Redorer le blason du mur pour mieux continuer son histoire
En octobre 2017 Goldman Properties organise un « coup marketing » avec Instagram pour booster leur campagne #kindcomments. C’est l’artiste anglaise Lakwena qui réalise alors une fresque hautement colorée, très kaléidoscopique avec l’inscription « Lift You Higher » – « Élevez-vous » ! Lakwena Maciver est connue pour son utilisation de messages puissants, de couleurs vives et de motifs géométriques. Dans sa jeunesse elle réalisait des bannières de protestation pour sa mère à Londres ; c’est à ce moment là qu’elle a comprit l’importance des mots. Cette fresque à message hautement positif a pour objectif d’atténuer le précédent scandale. Au final cette nouvelle œuvre a quand même tenu deux mois avant d’être recouverte du mystérieux prénom d’Anna ! en Janvier 2018. En Mars le mur est de nouveau blanchit à la chaux pour l’artiste suivant dont on ne connaît pas encore l’identité.
Banksy investit le Bowery Wall avec une fresque politique
C’est une fresque politiquement chargée que Banksy a réalisé mi-mars 2018 afin de protester contre l’incarcération de Zehra Dogan, une journaliste turque emprisonnée pour avoir peint une aquarelle de la ville de Nasyabin réduite en ruines à la suite d’une attaque des forces armées du gouvernement Turc. Elle a été condamnée à près de trois années de prison. Banksy a voulu montrer le décompte de cet emprisonnement injuste et a représenté la journaliste derrière les barreaux. La nuit l’aquarelle réalisée par celle-ci est projetée au dessus du mur. Je pense que ce n’est pas la peine que je vous fasse un petit topo sur Banksy vue sa notoriété !
Tristan Eaton invite les New-Yorkais et les touristes à faire une pause
Il aura fallu près d’une semaine en juin 2018 à Tristan Eaton, artiste d’Hollywood de renommée internationale, pour venir à bout de sa fresque « Intermission ». Une fresque très pop qui intègre tous les éléments propres au style d’Eaton. Cette « intermission », « pause » représente la pause dont tout le monde a besoin devant les événements déprimants qui se passent dans le monde. L’artiste délivre un message en invitant les gens à se mettre sur pause pour mieux redémarrer et pouvoir aller de l’avant pour la suite de leur voyage. Cette fresque est un immense succès et il semblerait que le mur de Bowery retrouve enfin un peu de sa splendeur.
JR revient en collaboration avec Time Magazine et aborde le sujet sensible des armes à feu
Personnellement je trouve toujours un peu bizarre que l’on demande à un artiste étranger d’illustrer un problème que l’on a dans son pays. Quand j’ai entendu parlé de la fresque ; cela m’a rappelé le film de Ken Loach en Américain où il traite de la guerre d’Espagne ! Mais voilà le Time Magazine réalise une série d’entretiens autour du débat sur le contrôle des armes à feu et demande à JR d’illustrer celui-ci pour la couverture. JR photographiera l’intégralité des personnes interviewées et les intègrera une à une dans son montage. Le résultat est une fresque très puissante ; du photojournalisme à grande échelle, sans parti pris. C’est justement ce manque de parti pris de la part de JR, qui a des positions fermes sur la défense des droits de l’homme, qui étonne les critiques. Mais voilà cette fresque ne ment pas, et elle montre une image certes terrible, mais une image qui représente la réalité : Il y a aujourd’hui plus de 265 millions d’armes à feu en circulation aux Etats-Unis !
Un 11 a été ensuite apposé sur la fresque par un artiste anonyme pour rendre hommage aux 11 victimes de la tuerie dans une synagogue de Pittsburgh. Le 9 novembre, une femme transforme le 11 en XII en hommage au douze victimes du bar Bordeline à Thousand Oaks en Californie. Une scène d’une rare intensité que les New-Yorkais, présents ce jour, là n’oublierons pas.
Retour aux racines : C’est la 1ère fois depuis des années que le Bowery Mural redevient un lieu de graffiti
C’est Wilfredo Feliciano et sa team TATS CRU, Une crew d’artistes New Yorkais qui a débuté sa carrière au début des années 80 en plein boum de la période des graffitis dans le métro de New York qui remet le graffiti à l’honneur sur le mur. Il est reconnu comme le plus grand « typographe » de Street Art avec ses lettres aux formes complexes, aux styles variés avec toujours une utilisation de couleurs explosives pour renforcer le relief. Étonnamment les autres graffeurs de la ville ne sont pas venus vandaliser sont oeuvre comme ils le font lorsque ce sont des artistes très connus comme Shepard Fairey ou Swoon.
Été 2019 : la Wall Therapy de Queen Andréa distille une belle dose de positivisme !
En juin, j’ai eu la chance d’être à New-York pour mon anniversaire, et encore plus de chance quand j’ai vu qu’une nouvelle artiste s’était emparée de ce mur mythique! Un peu comme si Queen Andrea, cette artiste qui a grandit à quelques pas du mur me faisait un cadeau! Cette spécialiste de la typographie et des murs géants offre un message simple et très coloré, une note d’espoir et de positivité avec son « BELIEVE » et « LOVE MORE ». Je ne sais si la Wall Therapy fonctionne mais il est vrai que sa typographie dynamique mariée à des couleurs vive ont tendance à vous mettre de bonne humeur !
Une estampe Japonaise géante recouvre le Houston Bowery Wall
Magnifique ! Cette fresque a été l’une des plus longue à voir le jour, et le résultat est à couper le souffle. C’est l’artiste Japonais Tomokazu “Matzu” Matsuyama qui en est l’auteur et a passé deux semaines complètes en octobre 2019 pour la réaliser. Cet artiste aime à mélanger les cultures, planter des personnages américains modernes, issus des magazines de modes, dans des décors traditionnels Japonais. Le résultat est tout simplement époustouflant; l’ensemble est magique et lorsque l’on se rapproche la peinture ressemble de la laque Japonaise de toute beauté. Il m’a rarement été donné de voir une aussi belle fresque; une œuvre féérique qui aurait tout sa place dans un muse ! Après cela je me demande quel artiste va pouvoir poser sa signature sur ce mur culte !
L’histoire continue…
Si vous avez tenu jusqu’à la fin de cet article : Bravo ! Personnellement j’ai eu l’impression d’écrire un livre ! Mais voilà je trouve tellement captivante cette histoire que je ne pouvais pas m’arrêter en route. Ce mur est mythique et son histoire chaotique est pleine d’anecdotes. Pour moi il représente le Street Art dans toute sa diversité ; tous ses styles, et les engagements ou non des artistes. C’est un lieu d’exposition à ciel ouvert magique ; lieu qui n’aurait jamais existé si Keith Haring n’avait pas peint la première pierre de l’édifice. Je finirais donc cet article avec une photo de Martha Cooper qui a immortalisé son travail.
Si cette longue histoire vous a étonné, captivé,… Merci de partager ; un petit moyen de me remercier pour ces longues recherches 😉 Et si j’ai aiguisé votre curiosité, n’hésitez pas à aller visiter mes articles sur le Bushwick Collective à Brooklyn ou encore le Welling Court Mural Project dans le Queens ! Deux lieux incroyables pour découvrir le Street Art Américain !
A très bientôt pour de nouvelles aventures artistiques !
Bonjour, dommage que vous ayez occulté une paftie de l’histoire de ce mur quand je suis venu le peindre illegalement en 2007 en parramlele de l’expo wooster spring. Peinture qui a fait polemique et engendré des tous sur le mur ainsi que sur la façade du candle building où se déroulait l’expo ..
https://nymag.com/intelligencer/2006/12/theres_graffiti_life_after_11_1.html
Ps: pour info tar’s cru est un crew (comme son nom l’indique et non un individu !!
Cordialement
Bonjour Jace, je suis plus qu’heureuse de recevoir votre message; car je sais qu’il me manque encore des infos sur ce mur iconique dont l’histoire me passionne. J’ai passé 15 jours à compulser tous les documents et infos que je trouvais pour écrire l’article et depuis je ne cesse de le mettre à jour dès que je déniche une info croustillante. Il est évident que je vais rajouter ce savoureux épisode ! Un gouzou à New-York, qui plus est sur le Bowery Wall c’est tout simplement génial 😉 Je vous envoie un petit e-mail pour en savoir un peu plus… Un immense merci pour votre intervention… Et pour Tat’s cru c’est modifié 😉
Merci pour ce bien bel article, hâte de lire la suite sur les nouvelles histoires du mur.
Merci Charlène pour ce commentaire bien sympathique. le nouveau mur devait être réalisé mi-mars; mais il a pris du retard vus les événements… De mon côté, confinée, je vais pouvoir prendre le temps d’écrire quelques articles avec de magnifiques fresques et découvertes 😉
Je suis fascinée par l’histoire de la ville de New York. L’une des choses qui m’a le plus intéressée, c’est la manière dont la ville a été élaborée.
Bonjour pl, Il est vrai que cette ville est fascinante et en constante évolution… Le nombre de nouvelles tours en construction ne cesse de grandir ! A chaque chantier de nouvelles découvertes Street Art sont visibles… Un vrai tourbillon ! J’espère que les prochains articles sur NYC vous plairont tout autant !